George S. Zimbel, un photographe humaniste

George S. Zimbel est né le 15 juillet 1929 à Woburn, Massachusetts, d’une famille d’origine lettone. Après avoir émigré au Canada en 1971, il déménage à Montréal en 1980, où il passera le reste de sa vie, jusqu’à son décès en 2023. Zimbel, un photographe important au Canada, est surtout reconnu pour ses œuvres dépeignant l’élément humain. Son œuvre s’inscrit dans le grand courant du documentaire social de la photographie américaine qui, découlant de la photographie documentaire, dépeint le quotidien des gens. Les photographes issus de ce courant documentent l’universalité de la condition humaine. Parmi les photographes québécois représentatifs de ce courant, on peut mentionner Claire Beaugrand-Champagne, Michel Campeau et Gabor Szilasi.

En 1947, Zimbel entreprend des études universitaires à New York au Columbia College et devient le photographe du journal de l’école. C’est au cours de sa deuxième année universitaire, en 1948, qu’il réussit à vendre une photo au magazine LIFE. À l’été 1949, il poursuit sa formation avec la coopérative Photo League (New York) sous la direction de John Ebstel, une expérience déterminante pour sa carrière de photographe documentaire. En septembre, de retour à l’université, il devient l’un des éditeurs du Columbia Daily Spectator. Il obtient son baccalauréat en art en 1951. Puis, après une rencontre avec Alexey Brodovitch, directeur artistique du magazine Harper’s Bazaar, Zimbel reçoit une bourse lui permettant d’assister à l’atelier du New School for Social Research offert par Brodovitch. Parmi les photographes reconnus, qui ont suivi les classes de Brodovitch au New School, on peut mentionner, entre autres : son ami Garry Winogrand, qu’il avait rencontré au Daily Spectator, Diane Arbus, Richard Avedon, Robert Frank, Lisette Model et Irving Penn. Avant de partir faire son service militaire en Europe en 1952, Zimbel se procure un appareil photographique 35 mm léger et abordable, un Nikon S.

De retour de son service militaire, il devient photographe professionnel, réalisant plusieurs reportages pour les grands médias américains. Le soir du 11 septembre 1954, l’agence PIX l’envoie photographier une scène promotionnelle de film. Il est parmi le petit groupe de photographes présents lors du tournage à New York de la célèbre scène du film The Seven Year Itch [Sept ans de réflexion], où l’on voit la robe blanche de Marilyn Monroe ondoyer sous le courant d’air de la grille de ventilation du métro. Pendant plus d’une vingtaine d’années, les photos que Zimbel avait prises de Marilyn dorment dans ses archives. En 1976, il les présente dans une exposition rétrospective au Centre des arts de la Confédération, puis à la Galerie de l’image à Ottawa en 1981 et à la Galerie Art 45 à Montréal en 1982. Ses images de Marilyn sont parmi les plus connues de son corpus. Ses nombreux autres projets comprennent un essai photographique sur les présidents américains (Truman, Eisenhower, Nixon et Kennedy), les portraits de l’éducatrice Helen Keller et celui du conseiller agricole Jack Ryan.

Cependant, les décennies 1950 et 1960 sont marquées par la guerre de Corée, la guerre froide avec la Russie, la chasse aux communistes du sénateur républicain Joseph McCarthy (qui persécuta plusieurs membres de la Photo-League), la guerre du Vietnam et l’assassinat du président John F. Kennedy. Cette période trouble motive Zimbel et sa famille à quitter les États-Unis pour le Canada en 1971. À l’Île-du-Prince-Édouard, pendant neuf ans et demi, Zimbel mènera la vie de fermier et son activité photographique s’en trouvera très réduite.

En 1980, après le départ de leurs garçons à Toronto, Zimbel et sa conjointe décident de rejoindre leur fille Jodi à Montréal où elle étudie. Celui-ci y reprend ses activités photographiques à temps plein et collabore notamment avec des agences de publicité, l’Université McGill et des magazines américains.

Son association avec Serge Vaisman de la Galerie Art 45 de Montréal et avec la Jane Corkin Gallery de Toronto lui permet de réaliser entre 1982 et 1991 quatre expositions solos à partir de ses photographies d’archives. C’est grâce à l’impulsion de ces galeries que nous pouvons maintenant retrouver les œuvres de Zimbel dans plusieurs collections publiques importantes.

Jusqu’au décès de sa conjointe Elaine en 2017, Zimbel n’a cessé de produire de nouvelles images et d’imprimer des photographies de ses archives, tout en participant à des expositions au Québec et ailleurs.

Photographe de rue

Outre ses activités photographiques commerciales et la diffusion de ses photographies d’archives, Zimbel poursuit l’exploration de sa ville d’adoption. Il a toujours son appareil Leica avec lui lors de ses déplacements et documente inlassablement la vie urbaine montréalaise.

Dans cette photographie de 1986, prise dans le métro de Montréal et intitulée Fun Fun, on retrouve l’essence des images de Zimbel : la photographie sociale, la spontanéité, une touche d’humour et le noir et blanc. Son appareil Leica le suivant partout, il est toujours prêt à saisir un instant décisif. Ici, dans le métro, toutes les personnes sont sérieuses, sauf les deux dames qui ont du plaisir, dont l’une porte un sac sur lequel il est écrit « Fun Fun ». Zimbel a su capter ce moment éphémère qui fait de cette photographie une image intéressante.

Dans cette composition, les deux rangées de néons donnent une impression de vitesse, accentuée par leur réflexion dans les fenêtres; les poteaux centraux divisent l’image en deux et participent à cette impression. Le léger déséquilibre vers la droite suggère aussi le mouvement du wagon.

Principales collections

  • Musée d’art contemporain de Montréal
  • Musée des beaux-arts de Montréal
  • Musée national des beaux-arts du Québec

 

Robert Hébert

Bibliographie

Crevier, L. (1988, 30 décembre). Les images insolites de George Zimbel. Le Devoir, 10.

Dessureault, P. (1999). Regards échangés : le Québec 1939-1970. Musée canadien de la photographie contemporaine.

Gratton, J.-F. (réalisateur) et Zimbel, M. (réalisateur). (2015). Zimbelism. George S. Zimbel 70 Years of photography [documentaire]. Shoot studio et Bunburry films.

Monzó, J. V., Molina Foix, V. et Lehmann, H. (2000). George S. Zimbel. Musée d’art moderne de Valence.

Zimbel, G. S. et Richard, Z. (2006). Bourbon Street, New Orleans 1955. Éditions du Passage.

Zimbel, G. S., Goldberg, V., Laferrière, D. et Sernovitz Zimbel, E. (2011). Le livre des lecteurs. Éditions du Passage.

Zimbel, G. S. et Sernovitz Zimbel, E. (2015). Momento. Black Dog Publishing.